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Une carte de contrôle, ou plus exactement un graphique de contrôle, est un outil utilisé dans le domaine du contrôle de la qualité afin de maîtriser un processus. Elle permet de déterminer le moment où apparaît une cause particulière de variation d’une caractéristique, entraînant une altération du processus. Par exemple un processus de fabrication pourra être mis à l’arrêt avant de produire des pièces qui seront non-conformes.

Les types de graphiques de contrôle les plus utilisés dans l’industrie sont les graphiques de contrôle de la moyenne et de l’étendue. Dans cette méthode, deux graphiques sont tracés et interprétés simultanément. Un autre type, souvent utilisé en économie, est le graphique de contrôle aux mesures individuelles.

Maîtrise statistique des processus (MSP) ou Statistical Process Control (SPC):

L’inventeur du graphique de contrôle (Control Chart) est Walter A. Shewhart, chercheur aux Bell Telephone Laboratories dont la filiale industrielle était Western Electric. Il a publié en 1931 les principes de la variabilité d’un processus en distinguant la variabilité aléatoire naturelle et la variabilité accidentelle. La variabilité naturelle est issue de causes communes de dispersion ou perturbations normales intégrées dans le processus de fabrication sous contrôle. La variabilité accidentelle est due à des causes spéciales occasionnelles et incontrôlées (matières premières aux caractéristiques fluctuantes, machines mal réglées, horaires de travail différents, qualification de la main-d’œuvre, changements de température ou de pression, mauvaise lubrification…). La MSP a pour mission de déterminer si le processus est sous contrôle ou non. Une analyse plus détaillée des causes des variations permettra d’améliorer ses performances et sa régularité.

Un graphique de contrôle est un outil de visualisation d’un processus dans le temps et de mise en évidence de sa stabilité (surveillance des causes spéciales).

Le graphique de contrôle en fabrication:

Ce graphique permet d’effectuer un réglage du processus de fabrication et de connaître sa capabilité machine. C’est un graphique chronologique dont les points représentent le suivi d’une caractéristique du processus. La valeur centrale (la moyenne) est représentée par une ligne horizontale. La limite inférieure de contrôle (LCL en anglais, LIC en français) et la limite supérieure de contrôle (UCL en anglais, LSC en français) sont représentées par deux lignes horizontales de part et d’autre de la moyenne.

Ce sont les limites à l’intérieur desquelles le processus est sous contrôle. Les valeurs d’une caractéristique mesurée doivent se trouver à l’intérieur de ces limites, sinon le processus est hors contrôle et doit être examiné.

Différents types de graphiques de contrôle:

Plusieurs types de graphiques de contrôle sont utilisés.

Graphiques pour variables quantitatives:

Les variables quantitatives sont des mesures continues (poids, longueur, épaisseur, température, diamètre…). On vérifie sur le graphique de la moyenne (mean chart) et sur le graphique de l’étendue (range chart) que le caractère étudié est stable dans le temps. La taille de l’échantillon est généralement comprise entre 3 et 6.

Graphiques pour variables qualitatives:

Dans le cas des variables qualitatives (% de défectueux, % de pannes, etc.), on utilise des graphiques aux attributs p, np ou c pour en vérifier la stabilité. La taille de l’échantillon est habituellement de l’ordre de 50 ou 100.

Graphiques de contrôle de la moyenne et de l’étendue:

La moyenne et l’étendue sont deux paramètres indépendants et complémentaires.

Les deux graphiques permettent de visualiser l’évolution des caractéristiques mesurées dans un processus. Le graphique de la moyenne est généralement moins dispersé que celui de l’étendue. Ils peuvent être mis en œuvre par un calcul informatisé.

But de la méthode:

Ces graphiques permettent de visualiser l’évolution des caractéristiques mesurées. Chaque graphique comporte une suite de points qui représente les valeurs de la moyenne et de l’étendue sur des échantillons prélevés à intervalles réguliers.

Le but est de suivre les performances de la production au moyen de deux graphiques qui montrent l’évolution du processus. On fait des observations individuelles sur des sous-groupes numérotés avec une fréquence de temps donnée (toutes les heures, trois fois par jour…). Sur chaque sous-groupe on effectue une observation. On reporte respectivement sur chaque graphique la moyenne et l’étendue du sous-groupe en fonction de son numéro chronologique qui sera reporté sur l’axe horizontal.

Une production est dite « table » ou « sous contrôle » lorsque la moyenne et l’étendue ne présentent pas de variations qui pourraient être attribuées à des causes particulières. En d’autres termes, des variations seulement dues au hasard.

Limites de contrôle:

Dans cette méthode, ainsi que Shewhart l’a démontré, le calcul des limites de contrôle sur les deux graphiques n’implique aucune hypothèse sur la distribution des données. Bien que les limites soient appelées ordinairement « limites à trois sigma », le calcul ne repose pas sur les écarts types mais sur les étendues.

Si le processus est stable, l’intervalle entre les deux limites de contrôle, LCL et UCL, contient 99,7 % des valeurs. La probabilité pour qu’un point se trouve à l’extérieur des limites est donc 0,3 %.

Exemple:

Une société fabrique des boîtes métalliques dont on mesure la masse en fin de fabrication. La masse dépend essentiellement de la composition des matières premières et de la qualité de l’alliage. La société décide de contrôler le processus de fabrication à l’aide de graphiques de contrôle moyenne et étendue pour la masse des boîtes. Le contrôle consiste à prélever 5 boîtes à la sortie de la machine et de peser chaque boîte dont la masse est exprimée en grammes. Ces masses ont été enregistrées à 20 reprises.

Tracer les graphiques de contrôle pour les cartes X et R (= étendue).

N° éch X 1 X 2 X 3 X 4 X 5 X ¯ R
1 81 85 82 84 83 83 4
2 86 81 83 84 80 82,8 6
3 87 87 87 88 82 86,2 6
4 87 85 89 86 84 86,2 5
5 81 89 86 85 87 85,6 8
6 84 81 87 87 84 84,6 6
7 84 87 93 87 85 87,2 9
8 87 86 82 87 86 85,6 5
9 83 79 87 84 86 83,8 8
10 85 82 85 84 86 84,4 4
11 81 83 85 85 84 83,6 4
12 85 79 78 83 86 82,2 8
13 87 83 89 85 80 84,8 9
14 87 86 86 79 83 84,2 8
15 89 82 86 86 85 85,6 7
16 90 84 81 85 83 84,6 9
17 86 82 85 86 88 85,4 6
18 85 83 83 85 89 85 6
19 80 81 83 87 82 82,6 7
20 85 89 82 79 83 83,6 10

La masse moyenne est 84,5 g. La limite supérieure est 88,23 g. La limite inférieure est 80,77 g. Le processus de fabrication est donc sous contrôle en ce qui concerne la moyenne.

Graphique de l’étendue

Ce graphique de contrôle permet de visualiser l’évolution et la variation de l’étendue (image de la dispersion) des mesures.

Les limites de contrôle sont les suivantes :

L I C = D 3 ⋅ R ¯

L S C = D 4 ⋅ R ¯

avec R ¯  : étendue moyenne dans l’échantillon = 1 n ∑ i = 1 n R i , où R i étendue du i-ème sous-groupe et n est le nombre de sous-groupes. La moyenne des étendues indique l’importance de la variabilité naturelle du procédé. Pour l’exemple ci-dessus, l’étendue moyenne est 6,750 g. La limite inférieure est : 0 g. La limite supérieure est: 14,28 g. Le procédé de fabrication est donc sous contrôle en ce qui concerne l’étendue.

Coefficients:

Ces coefficients servent à calculer les limites de contrôle en fonction de la taille des échantillons et du type de carte utilisée.

Taille A 2 D 3 D 4 σ
2
0 3,267 1,128
3 1,023 0 2,575 1,693
4 0,729 0 2,282 2,059
5 0,577 0 2,115 2,326
6 0,483 0 2,004 2,534
7 0,419 0,076 1,924 2,707
8 0,373 0,136 1,864 2,847
9 0,337 0,184 1,816 2,970
10 0,308 0,223 1,777 3,078
11 0,285 0,256 1,744 3,173
12 0,266 0,284 1,716 3,258
13 0,249 0,308 1,692 3,336
14 0,235 0,329 1,671 3,407
15 0,223 0,348 1,652 3,472
16 0,212 0,364 1,636 3,532
17 0,203 0,379 1,621 3,588
18 0,194 0,392 1,608 3,640
19 0,187 0,404 1,596 3,689
20 0,180 0,414 1,586 3,735

Graphique de contrôle aux mesures individuelles:

Dans l’industrie, quand les mesures effectuées ne sont pas assez nombreuses pour qu’il soit possible d’utiliser les graphiques de la moyenne et de l’étendue, on utilise le graphique aux mesures individuelles. Ce graphique est aussi utilisé en économie, où son usage est très général, notamment comme outil d’aide à la décision. W. Edwards Deming le recommandait particulièrement dans ses conférences. Les limites de contrôle sont calculées avec les étendues mobiles, qui s’obtiennent en calculant de proche en proche la valeur absolue de la différence entre deux mesures successives. Les limites de contrôle sont les suivantes : L I C = X ¯ − 2 , 66 R ¯ L S C = X ¯ + 2 , 66 R ¯

En dépit du fait que les limites de contrôle du graphique se nomment habituellement limites de contrôle à trois sigma, il ne faut jamais les calculer en utilisant sigma, ce qui donnerait un résultat faux, car l’ordre des mesures ne serait pas pris en compte.

Le graphique de contrôle aux mesures individuelles est valable à partir d’une vingtaine de mesures.

Graphiques de contrôle aux attributs:

Si l’on ne désire pas effectuer un contrôle de variables par mesures, ou si cela n’est pas possible, on préfèrera le contrôle de la qualité par attributs qui consiste à noter la présence ou l’absence d’un critère qualitatif sur les pièces contrôlées. Exemples : contrôle visuel (absence de défaut ou non), dimension trop petite ou trop grande (passage de la pièce dans un calibre)…
Les principaux graphiques de contrôle aux attributs sont :
1. Le graphique p pour la proportion de défectueux ;
2. Le graphique np pour le suivi du nombre de défectueux ;
3. Le graphique c pour le suivi du nombre de défauts.

Graphique p:

Principe:

On utilise ce graphique pour suivre la proportion p de défectueux contenus dans un échantillon en provenance d’un lot ou d’une machine. Sur un prélèvement au hasard, à intervalle régulier, d’un échantillon de n pièces, on note le nombre de défectueux trouvés que l’on divise par l’effectif de l’échantillon n (n > 50) pour obtenir p.
p = nombre de pièces défectueuses / nombre de pièces dans l’échantillon = d / n

On reporte périodiquement p sur un graphique où l’on fera apparaître la moyenne de proportion des défectueux et les limites inférieures et supérieures correspondantes.
La proportion moyenne de défectueux sur l’ensemble des prélèvements est : p ¯ = Σ d / Σ n
Les limites de contrôle se situent à 3 écarts-types de chaque côté de la proportion moyenne.

L I C = p ¯ − 3 p ¯ ( 1 − p ¯ ) n
L S C = p ¯ + 3 p ¯ ( 1 − p ¯ ) n

La loi qui régit le graphique de contrôle p est la loi binomiale: constatation de d pièces défectueuses (deux modalités) sur un prélèvement au hasard de n pièces. Lorsque n est grand, une approximation par la loi normale est légitime. L’intervalle [ μ − 3 σ ; − μ + 3 σ ] contient alors 99,7 % des données contenues dans les limites Lci et Lcs des cartes de contrôle.

Exemple:

L’entreprise GLASSEX fabrique des poignées en matière plastique utilisées dans l’ameublement des cuisines et salles de bain. On effectue un contrôle visuel toutes les heures sur un échantillon de 65 poignées pour détecter les principaux défauts : éraflures, couleur douteuse, microfissures, etc. afin de suivre le taux de défectueux dans le procédé de fabrication. Les résultats sur 28 séries d’échantillons sont mentionnés dans le tableau ci-contre.
On obtient une moyenne pour p de 0,079 avec un écart type moyen de 0,031 de défectueux.
La limite supérieure du graphique p est 0,179.

Graphique np:

L’utilisation du graphique np est recommandée si l’effectif n de l’échantillon demeure le même pour chaque série d’échantillons. On reporte sur le graphique np le nombre de défectueux observés chronologiquement dans les prélèvements successifs. Le nombre de défectueux dans un échantillon de taille n est d = np. Pour k prélèvements d’effectif n, le nombre moyen de défectueux est: n p ¯ = Σ d / k
avec
p ¯ = Σ d / n ⋅ k
On peut calculer les limites de contrôle basées sur des intervalles de trois écarts-types autour du nombre moyen de défectueux.
L I C = n p ¯ − 3 n p ¯ ( 1 − p ¯ )
L S C = n p ¯ + 3 n p ¯ ( 1 − p ¯ )

Graphique c:

Le graphique c est utilisé pour suivre chronologiquement le nombre de défauts par unité contrôlée (100 mètres de câble, 20 mètres de rouleau de papier peint, etc.). Il est différent des graphiques p et np, car le critère suivi est le nombre de défauts et non le nombre de défectueux (refusés), une pièce présentant des défauts pouvant être ou non acceptée. Suivant le critère de gravité du défaut (critique, majeur ou mineur), la pièce sera ou non considérée comme défectueuse. Le nombre moyen de défauts observés sur k unités contrôlées est : c ¯ = Σ c i / k
c i est le nombre de défauts observés pour la i ième unité contrôlée. Les limites de contrôle sont donc :
L I C = c ¯ − 3 × c ¯
L S C = c ¯ + 3 × c ¯

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